Colonel Pierre "Pépé" Jauze
Par le Général Paul Bonnet
Par décret du 21 avril 2006 de la Présidence de la République, paru dans le JO du 22 avril, le Colonel Pierre JAUZE est élevé au grade de Commandeur de la Légion d'Honneur. Il a reçu les insignes de Commandeur de la Légion d'Honneur, le 30 juin à Romans, au cours d'une cérémonie, simple et émouvante, présidée par le Général de Corps d'Armée (2S) Mazars de Mazarin.
Ce bref article retrace la carrière de " Pépé " que tant d'officiers et sous-officiers ont rencontré lors de leur premier stage à l'ESALAT ou lors de leurs mutations, tout en ignorant le passé héroïque de leur ancien.
Dans la première partie de sa longue carrière militaire, le Colonel JAUZE a été Légionnaire. Alors qu'il se destine à être professeur d'éducation physique, il résilie son sursis en 1952 et rejoint le 2ème Bataillon de Chasseurs Portés à St Wendel en Sarre. Il y est sélectionné pour suivre le cours des Elève Officiers de Réserve à St Maixent.
En septembre 1953, il est aspirant et choisit de servir au 3ème Bataillon Etranger de Parachutiste, stationné à Sétif, très rapidement il demande à servir en Indochine. En février 1954, il y rejoint le 1er Bataillon Etranger de Parachutistes. Alors qu'il est responsable de l'instruction des soldats vietnamiens, il a soif d'engagement et il se porte volontaire pour sauter, dans la nuit du 22 au 23 avril, en renfort sur Diên Bien Phu, alors que la situation des troupes françaises devient désespérée.
C'est dans cet enfer qu'il va connaître son baptême du feu. Après être intervenu à plusieurs reprises pour soutenir le point d'appui Huguette 5, il s'y bat corps à corps à plusieurs reprises, Il est alors cité à l'ordre du Corps d'Armée. Dans la nuit du 1er au 2 mai, à la suite d'un nouvel assaut sa position est submergée par un ennemi très supérieur en nombre, il est fait prisonnier.
L'Aspirant Pierre JAUZE est porté disparu, sa famille n'en sera informée officiellement que le 11 juin par le Maire d'Aurillac. C'est alors que va commencer une épreuve particulièrement éprouvante, en effet dès le jour de sa capture, il connaît les marches forcées dans la brousse. Il va parcourir près de 600km en l'espace de 26 nuits, tout en faisant l'objet de toutes sortes d'humiliations et de maltraitances pour rejoindre le Camp Vietminh N°1 de sinistre réputation. Il y restera quatre mois, torturé physiquement et moralement, il ne doit sa survie qu'à son exceptionnelle résistance et au magnifique esprit de camaraderie et de solidarité qui régnait alors entre les prisonniers.
Lorsqu'il est libéré le 2 septembre 1954, il est très affaibli, il ne pèse que 42 kilogrammes ! Il est hospitalisé à l'hôpital d'Hanoï puis à Saïgon. En novembre 1954, considéré comme transportable, il est rapatrié au Val de Grâce. Il y apprend sa nomination au grade de Sous-lieutenant d'active le 1er avril 1955.
En juillet 1955, volontaire pour servir en Algérie, il rejoint le 3èmeBataillon de Tirailleurs Algériens en opération à la frontière algéro-tunisienne. Puis il sert au 117e Régiment d'Infanterie dans le sud algérois. Il s'y distingue par son excellente aptitude au commandement et à la manœuvre. Il est cité à deux reprises , dont particulièrement une à l'ordre de la Division à la suite de son comportement exemplaire au cours des opérations menées dans le massif du Bou Ddjemel entre le 22 mai et le 6 juillet 1958.
A cette époque, il se porte volontaire pour suivre le stage d'observateur pilote avion. A l'issue de son stage il reçoit le brevet N°432. Désormais, après la Légion Étrangère et l'Infanterie, l'Aviation Légère de l'Armée de Terre devient sa deuxième famille. C'est en Algérie qu'il poursuit sa carrière opérationnelle comme officier observateur pilote avion. Compte tenu de son expérience opérationnelle acquise sur le terrain il fait preuve d'une très grande compétence dans ses nouvelles fonctions et Il est cité à l'ordre de la Division, à trois reprises, au cours de la seule année 1960.
De 1961 à 1964, après avoir suivi avec succès le stage de moniteur avion, il est chef de brigade d'instruction à Dax, puis en 1964 il retourne à Colomb Béchar où il commande le peloton ALAT du Centre Interarmées d'Essais.
De 1968 à 1970 il revient à l'ESALAT où dans un premier temps il commande l'Escadron d'Instruction Avions, puis il est autorisé à suivre le stage de pilote hélicoptère tout en créant le BPSR de l'école.
Après un retour dans l'Infanterie au 1er RI à Sarrebourg de 1971 à 1973, il rejoint le GALCA 1 à Phalsbourg.
Le 18 août 1975, il prend le commandement du 7e GALAT à Aix les Milles. Le 31 juillet 1976, cette unité est dissoute, il rejoint le GALAT STAT comme commandant en second, il y sert jusqu'en 1981.
Officier de grande valeur et de confiance, capable de rétablir des situations difficiles, le 15 mai 1981, il est à nouveau désigné comme chef de corps du 2ème GHL de Lille jusqu'au 31 août 1982 avant de rejoindre sa dernière affectation au COMALAT. Il est Chef du bureau de la Sécurité des vols et Président des commissions d'enquêtes accidents, postes qu'il tient jusqu'au 13 mai 1986, atteint par la limite d'âge, il quitte le service actif avec le grade de colonel.
Au cours de sa brillante carrière dans l'ALAT le Colonel Pierre JAUZE a effectué près de 5 000 heures de vol dont 936 en vol opérationnel pour 492 missions de guerre.
Le colonel Pierre Jauze était :
- Commandeur de la Légion d'Honneur
- Commandeur de l'Ordre National du Mérite
- Décoré de la croix de guerre des Théâtres d'opérations extérieurs avec une citation à l'ordre du CA.
- Décoré de la croix de la valeur militaire avec 5 citations : 1 à l'ordre de la Brigade, 4 à l'ordre de la Division.
- Décoré de la Médaille de l'Aéronautique.